Sri Lanka : La police antiterroriste doit cesser de harceler le photojournaliste tamoul Kanapathipillai Kumanan
Les autorités sri-lankaises doivent immédiatement mettre fin au harcèlement du journaliste tamoul Kanapathipillai Kumanan et annuler la convocation adressée par le département des enquêtes antiterroristes (CTID) de la police sri-lankaise, ont déclaré aujourd’hui huit groupes internationaux de défense des droits humains et des droits des médias.
Basé dans la province du Nord, au Sri Lanka, M. Kumanan est photojournaliste, président du Mullaitivu Press Club et défenseur des droits humains, qui documente les violations commises par les forces de sécurité à l’encontre des civils tamouls dans le nord et l’est du pays, fortement militarisés. Le CTID l’a convoqué dans le cadre d’une enquête le 17 août 2025. La convocation ne précise pas le motif de l’enquête, mais le défenseur a été informé par téléphone qu’elle est liée à ses publications sur les réseaux sociaux. On pense que ces convocations sont des représailles contre les reportages de M. Kumanan, principalement sur les questions de droits humains et, plus récemment, sur les fouilles du charnier de Chemmani, dans la province du Nord. M. Kumanan a publié des mises à jour et des photos sur les réseaux sociaux concernant les 41 jours de fouilles, au cours desquels il a indiqué que plus de 140 restes de squelettes ont été exhumés ou déterrés. Ses photographies ont été largement diffusées et publiées par des organismes de plaidoyer et les médias.
Depuis la fin sanglante du conflit armé en mai 2009, M. Kumanan joue un rôle clé pour couvrir les questions telles que les disparitions forcées, l’acquisition de terres par l’armée, les crimes contre l’environnement et les campagnes des communautés de survivants réclamant la vérité, la justice et des réparations pour les violations et les abus commis pendant la guerre.
Cette convocation s’inscrit dans le cadre d’un vaste programme d’intimidation à l’encontre de M. Kumanan, de sa famille et d’autres journalistes et défenseur⸱ses des droits humains qui dénoncent les violations, les abus et les crimes de guerre au Sri Lanka. M. Kumanan a déjà été la cible de représailles directes, notamment des menaces contre sa famille en 2024 qui visaient à le réduire au silence à cause de son travail.
L’utilisation de la CTID et d’autres mécanismes de lutte contre le terrorisme pour cibler un journaliste tamoul n’est pas nouvelle, mais elle reste très préoccupante. Sous les gouvernements successifs, les autorités sri-lankaises ont abusé de la loi régressive sur la prévention du terrorisme (PTA) et de la police antiterroriste pour punir les journalistes et les défenseur⸱ses des droits humains qui documentent et dénoncent les violations des droits et les abus, et pour les dissuader de faire leur travail. Les défenseur⸱ses des droits humains tamouls et musulmans, notamment dans le nord et l’est du pays, sont particulièrement touchés par ces représailles.
Nous demandons aux autorités sri-lankaises, notamment au ministre de la Sécurité publique, au chef de la police et au ministère de la Défense, de veiller à ce que tous les journalistes et défenseur⸱ses des droits humains au Sri Lanka puissent travailler dans un environnement sûr et favorable, à l’abri de tout acte d’intimidation et de représailles.
Nous demandons instamment à la communauté internationale, y compris aux mécanismes des droits de l’homme des Nations unies et aux États membres concernés, de surveiller de près toutes les violations et représailles en cours au Sri Lanka, en particulier l’utilisation abusive de la législation antiterroriste pour réprimer ceux qui s’expriment sur les crimes de guerre. Pour garantir cette vigilance, nous appelons le Conseil des droits de l’homme des Nations unies à renouveler le mandat de surveillance et de rapport du HCDH sur le Sri Lanka, ainsi que le projet de responsabilisation du HCDH au Sri Lanka, lorsque le Conseil examinera le bilan du pays en matière de droits humains — en particulier en ce qui concerne la responsabilisation et la justice — lors de sa prochaine 60e session.
Sincères salutations,
- Asian Forum for Human Rights and Development (FORUM-ASIA)
- Committee to Protect Journalists (CPJ)
- CIVICUS: World Alliance for Citizen Participation (Alliance mondiale pour la participation citoyenne)
- Front Line Defenders (FLD)
- Free Press Unlimited (FPU) International Commission of Jurists (ICJ)
- International Press Institute (IPI)
- Reporters sans frontières (RSF)

